02 Nov Privatisation des TER : organiser le rapport de force pour contrer le démantèlement de la SNCF
La CGT Cheminots de Périgueux a réuni une cinquantaine de personnes vendredi soir à la Bourse du Travail, à l’occasion d’une réunion publique. Au cœur des débats, le projet de privatisation des TER enclenchée par le président de la Région Nouvelle Aquitaine, Alain Rousset.
Faciliter l’arrivée d’acteurs privés sur les chemins de fer français ? Un projet que la droite libérale mûrit depuis de longues années. Mais ce qui surprend aujourd’hui (ou pas d’ailleurs !), c’est que ce soit le socialiste Alain Rousset qui mette cette privatisation sur les rails. En effet, plutôt que de prolonger la convention avec la SNCF de dix ans comme l’intime la loi, le président de la Région accélère son calendrier et souhaite voir l’ouverture à la concurrence des TER de Nouvelle Aquitaine dès 2023. C’est ce que l’édile a annoncé à l’occasion du débat d’orientations budgétaires de la Région le 18 octobre dernier (lire ici : Privatisation des TER : la CGT cheminots vent debout contre Rousset). Evidemment, l’annonce a fait l’effet d’une bombe dans les rangs des agents SNCF, et tout particulièrement au sein de la CGT.
« La SNCF est atteinte d’un cancer qu’on nomme capital », glisse ce vendredi Jérôme Jean, le secrétaire CGT des Cheminots de Périgueux, « son extinction est organisée depuis longtemps ». Le syndicaliste pointe le désengagement de l’Etat, la suppression de postes, la fermeture de guichets, l’arrêt du Fret, le manque criant d’aiguilleurs, de contrôleurs… Selon le diction : « Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage ». Dans le cas de la SNCF on lui inocule carrément le virus. « On nous dit qu’il n’y a pas assez de fréquentation, mais sans agents il n’y a pas de ferroviaire », poursuit Jérôme Jean, « en Dordogne, il en manque une dizaine. Résultat on adapte la circulation des trains en fonction du nombre de personnels en gare ».
« C’est comme si vous finissez les travaux de votre barraque, et qu’un mec s’installe sur votre canapé en disant casse-toi de chez moi ! »
Jérôme Jean, secrétaire CGT Cheminots de Périgueux
Mais aux yeux de tous les présents lors de cette réunion publique, l’orchestration de cette privatisation est loin de viser une amélioration sociale des salariés, pas plus qu’un meilleur service pour les usagers. Pour la CGT Alain Rousset ne fait d’ailleurs rien de moins que de brader au privé le service public ferroviaire historique. « On va offrir à des Vinci et autre Eiffage des technicentres, des voies, du matériel, des personnels formés… Ce n’est pas un découpage pour un meilleur service, mais bien pour permettre aux boîtes privées de se faire du fric avec de l’argent public », ne décolère pas Jérôme Jean.
« Mener collectivement la lutte, et créer le collectif nécessaire au rapport de force »
Frédéric Mellier, conseiller régional PCF
Notons ce soir-là, l’absence de la conseillère régionale socialiste Delphine Labails peu amène apparemment à venir échanger sur un sujet qui fâche. En revanche, Frédéric Mellier élu communiste de la Région, note quant à lui le débat de société que revêt cette ouverture à concurrence : « Quand on voit à l’hôpital, à l’école ou dans le domaine de l’énergie, on comprend ce qui se passe avec les TER. C’est toujours le même schéma : on supprime des femmes, des hommes, des moyens, et ensuite on dit que le boulot n’est pas fait ». Celui-ci insiste sur la nécessité de l’opérateur public et appuie ses propos avec l’exemple des Transports Urbains de Bordeaux abandonnés à Transdev. « Le coût au kilomètre a augmenté de 13, 25 %. Avec les TER ce sera pareil, l’efficacité économique vantée par Alain Rousset est mauvaise. Les opérateurs privés sont toujours là pour faire de l’argent, tous ceux qui disent le contraire mentent ! ». Frédéric Mellier parle d’accessibilité au travail, à la culture, aux loisirs, mais également d’enjeux écologique et climatique. L’élu indique que le groupe PCF portera ce combat dans l’hémicycle régional : « Le Parti Communiste mène déjà la bataille pour que cette ouverture n’ait pas lieu. Mais il nous faut que chacun, à tous les niveaux, prenne part collectivement à cette lutte pour créer le rapport de force pour être en capacité de gagner ». « Il nous faut des infrastructures ferroviaires qui permettent de concilier vie et besoins », poursuit David Plagès, responsable CGT Cheminots Aquitaine, « il nous faut mettre le débat sur la place publique, car citoyens, élus, usagers, cheminots c’est bien à nous de choisir ce que sera l’avenir du rail. Quand on porte les choses avec détermination et convergence on obtient gain de cause ».
De nouvelles rencontres publiques doivent avoir lieu afin de sensibiliser le plus grand nombre sur les conséquences de cette privatisation. Un tract sera également bientôt distribué en gares. A l’heure où de nombreux pays d’Europe font le choix de renationaliser leurs réseaux ferroviaires, gageons que la SNCF comme Alain Rousset ne prennent pas le train en marche.